Aujourd’hui, comme toutes les semaines, c’est séance postulations avec ta pote Nina. Lettres de motivation, C.V, attestations, et j’en passe, vos dossiers c’est sûr, c’est du béton. Vous n’avez plus qu’à trouver THE poste qui vous conviendra parmi les myriades d’appels à candidatures publiées sur LinkdIn. Après quelques heures de dur labeur, tu remarques qu’il y a un léger souci. La quasi majorité des offres d’emplois ressemble à-peu-près à ça:

Qualités requises pour le poste de [insérer l’intitulé du job ici]:

1. Un diplôme universitaire intergalactique (ou équivalent)

2. Permis de conduire (voiture, moto, avion de chasse)

3. Maîtriser l’allemand, l’anglais, l’espagnol et le zoulou est un atout

4. Au moins 7 ans d’expériences dans le domaine

5. Flexible (horaires irréguliers et heures supp non-payées)

6. Âge maximum: 24 ans

7. Salaire mensuel non-négociable : 2500 fr. brut à temps plein

8. Ta mère à poil sur un plateau


En ce qui me concerne, cela fait bientôt deux ans que je suis sortie de l’université. Avec un master, une spécialisation, un parcours entièrement bilingue (français-anglais), une poignée d’expérience et un putain de mémoire qui m’a valu d’être au bord du suicide durant quelques mois au moins, j’ai eu la prétention de croire qu’il y avait pire que mon profil au sortir des études. C’était compter sans ces putain de recruteurs qui, à mon avis, devraient sérieusement songer à y aller mollo sur le LSD.

Au-delà du fait de demander mille-et-une qualités ces fdp ont jugé bon de payer les gens comme des merdes. Normal. Au niveau des exigences inversement promotionnelles à la rémunération, ça s’passe? N’avez-vous donc jamais appris à compter? Êtes-vous inconscients? Devrais-je aussi vous offrir mon cul en bonus?…

Non parce que quitte à être pris pour des cons, autant que ce soit réciproque. En effet, si l’employeur n’a pas le sens des proportions, autant tout mettre à 0 et se calquer sur le même genre de plaisanteries.

Alors qu’on soit clair:

1. Oui, j’ai diplôme universitaire (en Lettres, certes)

2. Ça dépend. Si vous me proposez une voiture de fonction type Alfa Romeo Stelvio (j’en aurais besoin pour monter à Verbier le week-end), oui. Oh ça va, on rigole!

3. Oui bon, je gère déjà mieux l’anglais que notre président. J’dis ça, j’dis rien…

4. En parlant de président, dois-je rappeler que Trump n’avait aucune expérience politique à la base? Je ne veux donc plus jamais voir ce genre de choses dans un appel à candidatures, merci. Non cette fois on rigole pas…

5. Au début, oui. Passé les trois mois d’essai, LOL faut pas déconner.

6. On m’a toujours dit que je faisais plus jeune que mon âge. C’est très sérieux.

7. Vous, je suis sûre que vous avez voté «non» à l’initiative populaire fédérale : «1 :12 – Pour des salaires équitables», n’est-ce pas?

8. Ma mère vous emmerde

Car soyons réalistes, le projet du recruteur ne tient qu’en deux mots simples: ESCLAVAGE MODERNE. Et bien sachez mes amis, que moi aussi, je peux être dans l’abus le plus total. Et quand bien même mon audace se soldera certainement par un refus, ce n’est pas pour autant que je lâcherai l’affaire. Je n’aurai donc d’autre choix que de vous répondre comme suit, marché du travail saturé oblige:


Monsieur le directeur du personnel,
Votre lettre datée du [DATE] m’est bien parvenue ce jour.
Après un examen attentif de votre demande, j’ai le regret de vous faire savoir que je ne peux réserver une suite favorable à votre refus de m’offrir un emploi dans votre compagnie.
Cette année, j’ai déjà eu la chance de recevoir un nombre exceptionnellement grand de lettres de refus.
Je dispose donc d’une réserve variée et prometteuse de candidats et, il m’est malheureusement impossible d’accepter tous les refus.
Par conséquent, je suis obligée de me considérer comme nouveau membre de votre compagnie.
En vous souhaitant plus de succès dans vos futurs rejets et autres concrétisations de prérequis illusoires,
Veuillez accepter, Monsieur le directeur du personnel, l’expression de mes meilleurs sentiments.
[SIGNATURE]

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